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Un viaduc pour relier les territoires

Sur le plateau de Saclay, la construction d’un ouvrage spectaculaire progresse de jour en jour.
Reportage de terrain pour tout savoir sur le viaduc de la ligne 18 entre lanceurs, voussoirs, piles et tabliers.

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Sur les 35 km de la ligne 18 du Grand Paris express, le nouveau métro circulera en aérien sur 14 km.
Une section, entre la gare Palaiseau et la gare CEA Saint-Aubin, au carrefour du Christ de Saclay, accueille un viaduc de 6,7 km. Cette partie aérienne desservira trois gares. L’ouvrage est construit à partir de poutres de lancement, aussi appelées lanceurs. Ces engins impressionnants mesurent près de 100 m de long, 8 m de haut et pèsent plus de 500 tonnes. Ils posent le tablier du viaduc, une surface plane où circulera le futur métro, en assemblant des voussoirs.

Ces derniers sont préfabriqués sur un site dédié, à proximité immédiate du chantier afin de limiter les trajets pour les acheminer. Pour réaliser cet ouvrage, deux étapes sont engagées en quasi-simultané. Tout d’abord, la construction des 188 piles du viaduc suivant 4 zones de chantiers mobiles. Puis, la pose progressive et linéaire des 6,7 km de tablier depuis des parcours distincts qui s’appuient sur les piles déjà posées. Sur le papier, la méthode de construction est simple.

Au départ, des pieux en béton armé sont réalisés dans le sol. Au nombre de 4 par pile, ils permettent une répartition optimale des charges du viaduc dans des couches de sol dures et stables. Ensuite, un pré terrassement est réalisé, et un bloc en béton armé est construit par-dessus les pieux. C’est la semelle qui servira d’appui à la pile. Après avoir construit la semelle, deux cages d’armatures sont solidement fixées à la semelle. Elles assureront la résistance et la stabilité de la pile en béton armé. Les voussoirs, pièces de béton armé qui assemblées les unes aux autres constituent le tablier du viaduc, arrivent par convoi routier et sont levés et positionnés en utilisant la poutre de lancement et son chariot de levage.
 

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Chaque voussoir est positionné dans un ordre préétabli. Puis la section de tablier de 35 m est posée sur ses appuis définitifs. Il faut compter en moyenne 4 à 7 jours de travaux pour mettre en place une travée. Une fois installée, la poutre de lancement se déplace sur les deux piles attenantes pour poser la travée suivante. Enfin, un coffrage est installé autour des deux armatures avant d’y couler du béton. Une fois sec, le coffrage est retiré et de la terre vient recouvrir la semelle jusqu’au niveau du sol. Quand la travée de 10 voussoirs est suspendue au lanceur, des câbles en acier très résistants, appelés câbles de précontraintes, sont enfilés dans les gaines présentes dans chaque voussoir, puis tendus. Ce procédé permet de former une structure rigide et homogène.
 

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Un ouvrage spectaculaire

 

Le premier lanceur est parti du site de la future gare Orsay-Gif en avril 2022 pour parcourir 3,5 km et poser environ 900 voussoirs. En juin 2022, le second lanceur a débuté sa course de 3 km entre Orsay et Palaiseau. L’un des grands temps forts de ce chantier a été la “traversée” de la nationale 118. Il a fallu réaliser un franchissement spectaculaire de 30 m de haut et d’une portée de 58 m. C’est le plus haut franchissement du Grand Paris Express.
Pour faciliter l'insertion du viaduc dans le paysage, ses architectes (Explorations Architecture et Ida+) ont imaginé un projet aux formes douces, simples et épurées. En desservant Palaiseau, Orsay– Gif, et CEA Saint-Aubin sur l'un des plus grands pôles de recherche et développement au monde, une unité architecturale devait être pensée. La réponse a été apportée par Atelier Novembre et Benthem Crouwel Architects, qui ont su concevoir trois gares harmonieuses, dont les enveloppes évoquent des origamis, tout en conférant à chacune sa singularité.
Le viaduc de la ligne 18 s’appuie sur des caractéristiques techniques particulières, adaptées aux spécificités du territoire. Son tablier a une sous-face lisse et des piles aux dimensions réduites viennent le soutenir tous les 35 m en moyenne, pour créer un effet de légèreté. Les 3 gares aériennes, qui viendront s’intégrer autour du viaduc, sont en cours de réalisation depuis le 2e semestre 2022. En termes de transport et d’accessibilité, et grâce au génie des bâtisseurs qui réalisent ce viaduc déjà détenteur de records, il s’agira d’un élément central dans la desserte du plateau de Saclay.

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Un chantier de bâtisseurs

Pour en savoir plus sur ce chantier hors normes, Action a rencontré Benoit Texier, chef de projet secteur sur le viaduc de la ligne 18.
 

Action : La réalisation du viaduc de la ligne 18 est loin de passer inaperçue. Un bel ouvrage à réaliser ?
Benoit Texier  : Je vous le confirme, il s’agit bien d’un chantier exceptionnel. Au final, on à peu près 7 km de linéaire. C’est aujourd’hui le plus grand viaduc ferroviaire de France. Et il se situe dans les dix premiers de ce type au niveau européen.

Action : Côté technique, vu de l’extérieur, c’est assez impressionnant.
Benoit Texier  : L’ouvrage est mis en place à l’aide de deux lanceurs. Pour vos lecteurs qui circuleraient dans le secteur de Saclay, le long de la nationale118, ce sont les deux grandes machines jaunes et bleues. L’une part en direction de Palaiseau, vers le quartier de l’école Polytechnique et l'autre remonte depuis Orsay vers la future gare CEA Saint-Aubin. Ces machines mesurent une centaine mètres de longueur et pèsent 500 tonnes. Elles permettent la mise en place des voussoirs, des tranches de viaduc, qui sont assemblées puis encollées. Ensuite, on positionne des câbles de précontraintes en acier qui sont tendus. Une fois cette travée installée, le lanceur se déplace pour renouveler l’opération. Et ainsi de suite.

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Action : En passant régulièrement sur le site, on peut observer facilement l’avancée du chantier qui semble se dérouler sereinement, voussoir après voussoir. J’imagine que les phases préparatoires ont été primordiales ?
Benoit Texier  : Comme pour tous les ouvrages, et particulièrement sur un projet hors normes, le travail préparatoire est essentiel. Pour ce viaduc, on s’appuie, pour la pose, sur plus de 200 piles qui sont réparties tous les 35 mètres. Pour chacune d’elle, il faut réaliser des fondations sur la base de pieu d’environ 1,20 mètre de diamètre jusqu’à une profondeur de 25 mètres.
Nous utilisons aussi un système de puits marocains pour résoudre des problèmes de vibrations. La proximité du centre CEA Paris-Saclay et de l’école Polytechnique imposent des règles de sécurité spécifiques. Ces fondations mesurent 4 mètres de diamètre, remplies de béton, pour atténuer tous les problèmes vibratoires. Il faut avoir présent à l’esprit que selon la nature du terrain, tous les 35 mètres, on fait face à des difficultés particulières liées aux réseaux, au sol. D’où l’importance du travail d’études préparatoires pour gérer les interfaces avec les voiries, les réseaux.

Action : Comme on s’en doute pour la traversée de la nationale 118 à grande hauteur ?
Benoit Texier : Tout à fait. Le franchissement de la RN 118, qui a fait l’objet d’un très grand travail d’études et de préparation, a permis par exemple de mettre en place le tablier en seulement une quinzaine de nuits. Ce qui était très attendu pour limiter au maximum les impacts sur le trafic routier. Ce secteur est le point le plus haut du Grand Paris Express. Les piles mesurent environ 30 mètres pour une travée centrale de 58 mètres.

Action : L’aspect spectaculaire du chantier et le fait qu’il soit réalisé aux yeux de tous le rend aussi particulier à la différence d’autres réalisations du BTP qui sont parfois plus masquées du public.
Benoit Texier : Je vous le confirme aussi, le chantier est très visible. Mais nous n’avons rien à cacher !
Depuis sa mise en route et au fil des mois, il suscite un immense intérêt et une grande curiosité. Les premiers spectateurs sont les automobilistes qui empruntent quotidiennement la nationale 118et observent l’avancée des travaux.
Les habitants du plateau de Saclay font preuve aussi d’un grand intérêt. En octobre dernier par exemple, lors des Journées portes ouvertes organisées sur le chantier, j’ai été le premier surpris, avant même l’ouverture des portes et malgré une météo vraiment exécrable, de voir le nombre de personnes qui attendaient pour découvrir le site de plus près. Et tout au long de la journée, malgré les fortes pluies et le froid, leur curiosité et leurs questions n’ont pas cessé.  

 

Photos reportage : Gérard ROLLANDO / Olivier BRUNET / Société du Grand Paris.



 
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